Vincennes : témoignages, faim et feu


Deux véhicules de la croix rouge incendiés au 6ème arrondissement de paris en solidarité avec les détenus du CRA de Vincennes. En italie comme en France la Croix Rouge sous l’alibi d’un aide humanitaire est complice et bourreau des prisons ethniques

De Indymedia Lille

Dans la nuit du 1 au 2 décembre, 2 véhicules de la Croix Rouge sont partis en flamme rue Desgoffe dans le 6e arrondissement à Paris. Voulant faire croire qu’elle « aide » les gens, la Croix Rouge est présente dans plusieurs camps pour étrangers et réfugiés, ainsi que dans plusieurs centres pour sans-abris. Mais la Croix Rouge ne fait qu’enfermer les pauvres dans leur misère : c’est la caution humanitaire de l’Etat et du capital.

Solidarité avec les évadés et les révoltés du centre de rétention de Vincennes.

Entre-temps ils arrivent des témoignages de l’intérieur du centre

1ère personne retenue :

« Ce qui se passe à l’intérieur, c’est tout clair. On est même pas libre dedans. On mange que ce qui est presque périmé. Par exemple, ce que l’on nous a donné à manger aujourd’hui, est mangeable jusqu’au 24 et on est le 24. On nous a aussi donné à manger un truc comme du poulet rôti, périmé le 25, demain. C’est quoi ça ?! On dort même pas libre. À 5h ou 6h, ils appellent au micro « monsieur…. », super fort en plus. On peut pas dormir. Je suis fatigué. Là, on est dans le bâtiment D-E [1] . Je ne sais pas quel numéro c’est. Parce qu’il y a trois bâtiments. Là on est dans celui qui est à côté de leur entrée. Franchement c’est la galère. C’est même pas un centre ça ! C’est plus que la prison ! (derrière, on entend les haut-parleurs du centre, un son fort et inaudible en sort.) Ils le font exprès. Ils veulent nous maltraiter. Ils augmentent le volume. Ils le font exprès. On ne comprend rien ! La grève, ça fait presque deux jours (depuis mardi 23 novembre) qu’on n’a pas mangé ! Il y a des indiens, des pakistanais, des chinois… Ils n’ont pas mangé. Ils ne sortent même pas. Ils restent dans les chambres. Y’ en a qui ont tout de même mangé. Ils sont malades, ils ne peuvent pas faire la grève. Mais la plupart font la grève. Dedans, on est un peu plus de soixante-dix. On est environ soixante à faire la grève. On a décidé de faire la grève en ce faisant passer le message. De toute façon, si on mange les trucs d’ici, bientôt périmés, on va tomber malade. Alors c’est mieux de pas manger. Si c’était périmé dans dix ou cinq jours peut-être qu’on mangerait, même si c’est dégueulasse. Mais là, périmé le lendemain ou dans même pas deux jours, non ! C’est aussi contre les violences de la police qu’on fait la grève. De toute façon, ils s’en foutent de notre grève. Ils disent juste : « Vas-y, vas-y fait la grève ! De toute façon tu seras pas libre ! » Les gens qui sont partis, qui se sont échappés, ils ont cassé la fenêtre à cause des violences et tout ça, ils sont sortis du centre. Ils préfèrent sortir de là, s’enfuir que rester encore deux ou trois jours ! Franchement c’est malade ici. Y’ a des gens qui prennent des rasoirs. Y’ en a qui se sont blessés eux-mêmes leur corps, leurs mains. Pour qu’ils sortent. Ils n’ont pas le choix. Y’ en a deux ou trois, je ne sais plus, qui ont réussi à s’échapper. Les autres se sont fait attraper par la police. Ils n’ont pas réussi à aller jusqu’à l’autoroute. Après ils les ont emmenés ici. Ils les ont frappés, tapés. Des violences. Après ils les ont changés de centre. C’est grave, c’est grave ! Y’ a des gens qui sont tombés malade à ce moment là. Quand t’es malade, pour voir l’infirmière, avoir des médicaments, ils te disent toujours qu’il faut attendre, qu’il y a déjà beaucoup de monde. Comment ça se fait qu’il y a qu’une seule infirmière dans le centre alors qu’on est plus de cent quatre-vingt personnes. Le soir, elle est pas là. Y’ a pas de permanence. Si tu tombes malade le soir, faut que tu attendes jusqu’au lendemain. Et le lendemain, y’ a pas de place. »

2ème personne retenue :

« Les droits des gens, sont bafoués. Y’ a des gens qui tentent de se suicider tous les jours. Y’en a qui se blessent avec des lames. Ils s’écorchent… »

3ème personne retenue :

« Ici la nourriture n’est pas bonne. Elle n’est pas fraîche alors les gens tombent malades. Hier, on a décidé d’arrêter de manger, et le midi et le soir, il y a eu plein de gens qui n’ont pas mangé. »

4ème personne retenue :

« Ici, ils nous donnent pas bien à manger. C’est toujours la même chose, ça fait trois jours que moi je ne mange pas et hier on a commencé la grève de la faim. »

La première personne reprend la parole :

« Les gens disent qu’ils feront la grève jusqu’à ce qu’ils soient libérés, jusqu’à ce qu’ils soient libres, qu’ils sortent de cette merde, excusez-moi de dire ces mots là, mais c’est vraiment la merde. Un journée ici, c’est comme un mois. On veut la liberté, on veut sortir de la merde. Dans les autres centres, je sais pas, mais ici tu ne peux même pas dormir, à 5h du matin ils mettent les hauts-parleurs. A 5h du matin ? ça va pas ou quoi ! Quand tu dois voir le juge, ils te lèvent à 5h du matin, mais tu vas où à 5h ?! Tu t’habilles, tu sors, t’as même pas pris ton petit déjeuner, ils te sortent dehors et t’attends, t’attends, t’attends… pendant trois heures. Ils pourraient nous laisser dormir jusqu’à 9h et puis partir direct. Pour aller voir le juge, il faut attendre trois heures, dehors, dans le froid. Pour voir le juge à 10h, on pourrait se lever vers 8h30. Ils te sortent à 6h et t’attends 7h, 7h30, 8h, et à 9h, tu pars voir le juge. On est des êtres humains, on est pas des animaux, on est pas des robots pour rester dehors dans le froid. Alors on leur demande : « s’il vous plait monsieur est-ce qu’on peut attendre dedans ? » Comme ça on reste au chaud pour boire un petit café. Ils nous répondent « Non, tu peux pas, t’as pas le droit, restes là jusqu’à 10h ». On veut sortir de la merde, c’est pour ça qu’on fait la grève, c’est ce que veulent les gens. Les seules personnes qui mangent, c’est parce qu ’elles sont malades. Les autres ne mangent pas et de toute façon même si tu veux manger, qu’est-ce que tu vas manger ? Des choses périmées ?! Ils donnent le poisson avec la sauce, là, et puis des pâtes toujours des pâtes, des pâtes, des pâtes. La viande, ils la gardent pour eux. On est des êtres humains, on peut pas manger tous les jours la même chose. Y’ a des trucs que les policiers gardent pour eux, ils cachent les boîtes et ils vont les manger dehors. Parcequ’ ils ont pas le droit de manger dedans. Je vous jure que j’ai vu un policier qui a caché dans sa veste une boîte, qui était normalement pour nous, pour la manger dehors. La viande c’est pour les retenus du centre, c’est pas pour eux. Je vous jure qu’il a demandé à la dame qui surveille les gens du centre [2] de lui mettre de coté… »

5ème personne retenue :

« Ici, c’est de la merde ! La bouffe, c’est de la merde. Les policiers sont pas gentils, y’ en a qui se font taper par les policiers. »

6ème personne retenue :

« Bonsoir, moi je suis clandestin, je suis dans le centre de rétention. Dedans, il n’y a que de la merde, y’ a pas de bonne nourriture, c’est la prison. »

7ème personne retenue : (elle parle en italien)

« début en italien… »

Puis une personne traduit ce qu’il dit :

« Il a été frappé par la police. Il a subi des violences. Il a sa main cassée, il a demandé à voir l’infirmière, on lui a répondu : « non pas aujourd’hui, demain ». Il doit attendre, alors qu’il ne sait même pas ce qui est arrivé à sa main. Elle est cassée, il faut mettre un plâtre. Le monsieur, il a mal à la main, il peut même pas manger avec, il arrive pas à dormir. Qu’est-ce qu’il peut faire ? Il a pas le choix, il va attendre jusqu’à demain. Ça fait quatre jours. Il y avait deux personnes qui parlaient, elles se chamaillait mais gentiment, puis quatre ou six policiers sont entrés dans la salle et ont commencé à frapper tous ceux qu’ils trouvaient. Lui, il a reçu quatre coups sur la main. Son copain aussi s’est fait frapper. Leurs vêtements sont tout déchirés à cause de la police. Il dit qu’on lui a même pas donné des choses pour s’habiller alors il se couvre avec une couverture. Il a demandé au bureau, à l’office, quelque chose pour s’habiller, ils ont même pas voulu lui donner de vêtements. Franchement le centre, c’est grave ce qui se passe ici. Si vous pouvez faire quelque chose, il faudrait que tout le monde sorte de là, s’il vous plait. Y’a quelqu’un qui a sa femme et ses enfants dehors, son vol est programmé, il doit partir. Je vous parle sérieusement. »

8ème personne retenue :

« Moi je suis en grève de la faim depuis le début, il y a beaucoup de monde ici qui la font. Lundi soir on a entendu un feu d’artifice. On a vu un peu, on est sorti pour crier mais il y a des renforts de police qui sont arrivés… »

notes :

1-Selon l’ASSFAM, il y a 4 « unités » à l’heure actuelle à Vincennes (et non pas trois ), dont un serait « provisoire ». C’est le batiment 1 qui se compose de l’unité D et E. Toutefois il semblerait qu ’il n’y ait pas de véritable cloisonnement, puisqu’ils mangent ensemble, ont accès aux memes cabines téléphoniques, auxmemes « services » associatifs et autres…

2-Il s’agit sans doute d’une employée de l’entreprise de sous-traitance Gestion des Etablissments Pénitenciers et Services Auxiliaires ( GEPSA filiale de GDF-Suez). Selon l’ASSFAM, ils « organisent la vie dans le centre » (sic !). En fait ils s’occupent de la gestion des chambres, des repas, des services de l’hygiène etc…

fermeturetention@yahoo.net

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